Paris, Telecom Paris Tech, du 11 au 13 novembre 2015.
Date limite de soumission des propositions : 30 avril 2015
Avec la généralisation du numérique, l’ensemble des pratiques culturelles a fait l’objet d’importantes reconfigurations : d’une part, les publics ont accès à une quantité significativement élargie de biens ; d’autre part, le modèle de la gratuité et les pratiques de piratage ont modifié le consentement à payer ; de même, la dématérialisation des contenus tend à transformer la culture du data en une culture du service ; enfin, le caractère pléthorique des répertoires proposés aux publics a rendu nécessaires de nouveaux modes de recommandation, dont l’importance croissante des algorithmes témoigne.
Dans le cas de la musique, le passage de la discomorphose à la numérimorphose semble reconfigurer de manière particulièrement saillante les pratiques de consommation, et plus généralement la musicalisation du quotidien. Collectionne-t-on et apprécie-t-on les oeuvres dématérialisées comme on s’appropriait les vinyles ? La question de la qualité sonore constitue-t-elle encore un enjeu pour des utilisateurs désormais habitués à
l’écoute à partir de fichiers compressés ? L’idée que la musique puisse être un bien payant a-t-il encore un sens pour les nouvelles générations d’auditeurs ?
Ce colloque, organisé dans le cadre du projet de recherche Musimorphoses financé par l’Agence Nationale de la Recherche (ANR), a pour objectif principal de décrire les différentes dimensions de la musicalisation du quotidien et de proposer des scénarios prospectifs dessinant le futur de l’écoute musicale. Il ne porte donc pas sur l’activité des musiciens ou sur l’industrie musicale, mais sur la place qu’occupe la musique dans la vie des auditeurs en lien avec le numérique.
Un colloque autour de six questions
1) Ruptures et continuités ?
Le virage numérique doit-il être envisagé comme une rupture inédite, qui transformerait de manière très significative nos façons de consommer, d’apprécier, de catégoriser et de nous représenter la musique ? Du point de vue de la socio-histoire, comment décrire ce virage numérique et ce qu’il transforme réellement dans la musicalisation du quotidien ?
2) La recommandation ?
Dans un univers marqué par l’abondance de références disponibles et l’hyper-choix, les algorithmes prennent une place croissante dans les mécanismes de la recommandation. Ces algorithmes, de plus en plus sophistiqués, contribuent-ils à l’élargissement du portefeuille des goûts ou sont-ils des dispositifs de formatage des préférences ? Comment cohabitent-ils avec les autres logiques de recommandation ? Redessinent-ils les ontologies et les catégories descriptives de la musique (par exemple la notion de genre) ?
3) Le prix à payer ?
Avec l’extension du domaine du piratage et l’utilisation du stream-ripping, les publics tendraient à considérer la musique comme un bien sans coût. S’achemine-t-on vers un modèle ultra dominant de la gratuité ou voit-on émerger de nouvelles offres et de nouveaux services (sur le modèle de la plateforme Qobuz par exemple) susceptibles de redynamiser le consentement à payer ?
4) Les technologies de l’écoute ?
Avec le développement croissant des cloud, du multiroom, des technologies portables, des nouvelles normes d’encodage du son, de l’accès aux métadonnées, l’écoute semble être devenue hyper-mobile, hyper-connectée et hyper-accessible. L’innovation technologique va t-elle induire des expériences inédites d’écoute ? Sur quels fronts les innovations se porteront-elles ?
5) Écoute locale, écoute globale ?
Dans un monde où les technologies numériques réduisent les distances et les frontières – même si l’accès à l’Internet est encore inégalement partagé – les goûts et les pratiques semblent à première vue s’homogénéiser. Assiste-t-on pour autant à l’imposition d’un modèle standardisé et globalisé de la consommation musicale ? Ou bien une nouvelle géographie de l’écoute et du goût musical est-elle en train de se dessiner, faîte de sous-cultures,
d’hybridation, etc. rendues possibles ou amplifiées par le numérique ?
6) La régulation de la consommation musicale ?
La crise de l’industrie musicale, la généralisation du téléchargement illégal et l’instabilité des business models ont amené certains Etats à adopter des réponses législatives variées et parfois très coercitives mais qui ne semblent pas parvenir à enrayer la crise du marché du disque. La contrainte régulatrice est-elle la seule solution face aux nouveaux modes de consommation et à l’adaptation incessante des consommateurs à l’innovation et aux verrous technologiques ?
Les propositions de communication seront adressées à l’adresse suivante pour le 30 avril 2015 (dernier délai) : musimorphoses@gmail.com
Ces propositions ne dépasseront pas une page. Elles contiendront obligatoirement un intitulé, une brève notice biographique de l’auteur (avec une adresse mail) et feront apparaître une problématique originale et le type de terrain et d’approche méthodologique sur lesquels la communication s’appuie. Les auteurs des propositions seront informés des résultats du processus de sélection au plus tard le 31 mai 2015.
- Responsable du colloque : Philippe Le Guern, Professeur, Université de Nantes / CAPHI et CRAL-EHESS. mail : philippe.leguern@univ-nantes.fr
- Comité d’organisation : Thibault Christophe (Université Toulouse 2-Jean Jaurès), David Delfolie (IDHES / IRASEC), Philippe Le Guern (Université de Nantes / CRAL-EHESS), Emmanuelle Olivier (CNRS / EHESS), Gabriel Segré (Université Paris 10 Nanterre).
- Comité scientifique : Eitan Altman (INRIA), Emmanuel Bigand (Université de Bourgogne-IUF), Esteban Buch (EHESS), Michael Bull (Université du Sussex), Nicolas Donin (IRCAM), Joël Gilbert (Université du Maine et CNRS), Antoine Hennion (Ecole des Mines), Martin Kaltenecker (Université Paris Diderot), Pascale Kuntz (Université de Nantes), Philippe Le Guern (Université de Nantes), Arnt Maaso (Université d’Oslo), Sophie Maisonneuve (Université Paris Descartes, Sorbonne), Isabelle Marc (Universidad Complutense de Madrid), Morten Michelsen (Université de Copenhague), Abdoulaye Niang (Université Gaston Berger, Sénégal), Sylvie Octobre (DEPS-Ministère de la Culture), Nick Prior (Université d’Edinburgh), Peter Szendy (Université Paris 10), Philip Tagg (Université de Leeds / Université de Manchester).