Quasiment oublié de la science politique du Moyen-Orient et de l’Asie du Sud, laquelle a longtemps postulé sa disparition à la faveur des exodes ruraux massifs du dernier tiers du xxe siècle, le fait tribal a ressurgi, notamment dans l’ancien Croissant fertile à la faveur des soulèvements et contrinsurrections de ces quatre dernières années. Au travers d’études de cas échelonnés de la Syrie au Népal, la rencontre proposée tentera de faire le point sur les transformations du tribalisme actuel et sur ses mobilisations politiques par une variété d’acteurs locaux, régionaux et internationaux (cf. le modèle stratégique dit d’al-Anbar, cher au Pentagone pendant les premières années d’occupation étatsunienne de l’Iraq). Nous examinerons également le rôle que des élites issues des chefferies d’antan sont amenées à jouer à la fois dans l’organisation de la vie religieuse (dans la géographie de certaines voies soufies, par exemple) et dans la politisation de cette dernière (à travers notamment l’essor, depuis les années 1980, de réseaux hiérarchisés d’écoles religieuses modernes impliqués dans la vie publique ainsi que de partis politiques se réclamant de formes diverses d’islam). En relation avec le développement d’ethnicités marginales transfrontalières (arabe sunnite aux confins de la Mésopotamie, aymaq au Khorassan, baloutche entre mondes iranien et indien, kirant sur la frontière entre la Chine et l’Hindoustan…), les participants se pencheront sur le rôle d’une variété de sociétés tribalisées dans le développement actuel de formes diverses de transnationalisme musulman, entre culture de la différence et construction d’identités supra-ethniques à un moment où les notions d’histoire croisée ou connectée se substituent à celle d’histoire de la nation.
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