Vers une histoire transnationale des études turques (18e-20e siècle) / Toward A Transnational History of Turkish Studies (18th-20th Centuries)
L’histoire des études turques a été largement négligée. Les travaux existants revêtent pour la plupart une forte tonalité bio-bibliographique (voire hagiographique) centrée sur « la‑vie-et-l’œuvre » de tel ou tel individu. En outre, menés pays par pays, ces études négligent le poids des circulations internationales. Notre projet est donc d’écrire une histoire sociale et transnationale des études turques, c’est-à-dire de penser les héritages multiples (européens, russes, ottomans, turcs, arabes, japonais, chinois, américains etc.) qui ont contribué à l’autonomisation intellectuelle et institutionnelle de la turcologie. Nous proposons d’isoler trois axes de réflexion :
1. Qu’est-ce que la turcologie ? Quand apparaît-elle ? Diffère-t-elle des « études turques » ? De quels « Turcs » traite-t-elle ? Comment s’articule-t-elle à l’histoire de l’orientalisme et à celle des humanités en général ? à celle des sciences sociales et des « aires culturelles » ?
2. Qui « fait » les études turques ? D’où viennent les turcologues ? Comment devient-on turcologue ? Qui sont les subalternes de la turcologie ? Qui sont les acteurs non-universitaires ? les étudiants ? Quels sont les réseaux de la turcologie ?
3. Quel est le rôle social du turcologue (renseignement, armée, diplomatie, expertises diverses) ? Quels sont les usages politiques de la turcologie ? Quels sont les liens entre l’histoire de la turcologie et celle du nationalisme turc ? de la colonisation ? des migrations internationales ? Existe-t-il une turcologie de guerre ?
Turkish studies, as a seemingly autonomous field of knowledge, has not been critically examined. With few exceptions, the existing literature generally provide a linear, internalist, if not hagiographic narrative centered on the “life-and-work” of a series of outstanding individuals. Moreover, conducted country by country, these surveys tend to neglect the international circulation of ideas, men and artifacts. We wish to take into account the different inheritances (European, Russian, Ottoman, Turkish, Arab, Japanese, American etc.) that have contributed to the intellectual and institutional autonomization of the field. We propose to follow these leads through three sets of questions focusing on the definition, the actors, and the uses of Turkology.
1. What is Turkology? What is its object? Is it different than "Turkish studies"? Who are the "Turks" under consideration? When did Turkish Studies appear in the different countries, and how did they fit in the broader fields of orientalist scholarship, the humanities, and the social sciences at large?
2. Who is a Turkologist? How does one become a student in Turkish studies? Who are the non-academic and/or subaltern contributors to the field? What are the local, national and international networks enacted by these people?
3. What use is Turkology? What is the social and political role of the Turkologist (intelligence, military, diplomacy, translation etc.)? How were Turkish studies connected to Turkish nationalism(s)? To colonial empires? To international migrations? Is there such a thing as "War-Turkology"?
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