L'altérité et l'identité à l'épreuve de la fluidité

Colloque organisé par le groupe de recherche Frontières identitaires et Représentations de l’altérité, Institut des Mondes Africains/IMAF - Université Fédérale du Rio Grande du Sul (Brésil) - 17 et 18 novembre 2014 - Paris, France.

Ce colloque se propose d’approfondir l’analyse des processus d’identification mis en tension dans les situations sociales d’hybridité et d’ambivalence. Les constructions identitaires sont au centre des problématiques sociétales contemporaines. De ce fait, on observe que certains remparts s’élèvent face à la fluidité des liens sociaux et intimes, ou encore à l’individualisme accru. L’un d’entre eux consiste, dans certains contextes, à se tourner vers des valeurs plus traditionnelles. Des espaces sociaux proposant des cadres de référence identitaires plus solides et fortement hiérarchisés peuvent alors s’imposer, que ce soit dans l’espace social, au sein de la famille ou du couple. Quels peuvent être ces diverses manifestations, parfois contradictoires, de recherche de structures traditionnelles, et comment s’accommodent-elles, ou pas, aux différentes transformations dans l’espace-temps historique et géographique, institutionnel et politique, social et intime ?

Ce colloque international s’intéresse aux phénomènes liés aux transformations de l’ordre social qui  affectent les structures étatiques, les conditions de travail, la subjectivité, la production culturelle, la vie quotidienne et notre rapport à autrui. Nous nous proposons alors d’examiner les modalités d’identification attachées à l’évolution du « vivre ensemble » et du lien indéfectible de dépendance entre l’individu et le collectif, en tant que socle fondateur de la vie commune. Dans une optique multidisciplinaire, il s’agira d’explorer les approches analytiques multidimensionnelles et d’observer les processus de déconstruction et de résistance aux grands récits à caractère absolu.

L’objectif principal de ce colloque sera d’approfondir la critique sociale des discours sous-tendant les appartenances, les processus de subjectivation et d’identification à caractère éminemment négociable et révocable, et, par conséquent, l’impossibilité de les définir une fois pour toute. Nous nous engageons à questionner, d’une part, les ambivalences propres aux appartenances et aux besoins identitaires des acteurs sociaux et, d’autre part, la fluidité et l’affaiblissement des liens sociaux et du corps institutionnel au sein des sociétés modernes. Comment réaliser l’unité dans (malgré) la différence, et comment préserver la différence dans (malgré) l’unité ? Comment peut-on conjuguer l’instabilité et le caractère éphémère des identités sociales et la recherche de cadres référentiels plus structurants ?

 

Deux axes sont proposés :


I. Le corps, le soi et l’autre : la construction de la subjectivité à l’épreuve de la fluidité


D’un point de vue davantage axé sur l’expérience et le vécu des individus, nous nous poserons la question du comment le sujet moderne/contemporain se construit dans un contexte où les modèles traditionnels de « masculinité » et de « féminité » sont de plus en plus contestés (cf. les études de genre et les études queer). En amont, comment hommes et femmes construisent-ils/elles leurs identités de genre, de sexe et de sexualité dans leur rapport à soi et à l’autre – malgré les cadres normatifs trop structurés, naturalisés ou contraignants de leur vie privée ou publique ? Il s’agira aussi d’observer les relations amoureuses et intimes prises aux jeux/enjeux de la mondialisation et du brassage des différents modes d’existence occidentaux et orientaux. Dans ce même sillage, on se demandera quel est le rôle de la couleur de peau (sous l’optique intersectionelle : genre, race, sexe/sexualité, classe/statut social et couleur de peau) dans le contexte postcolonial ? Les idéologies du colour-blind sont-elles suffisamment opérantes face à la grandissante banalisation de la discrimination et du racisme au quotidien touchant les plus divers domaines de la vie commune ? Comment les hommes et les femmes  noirs(es) et métis(es) déploient-ils/elles leurs spécificités identitaires et leurs capacités d’agir sur les rapports sociaux ? Comment articulent-ils, ou pas, leurs positions au sein des rapports de pouvoir dans leurs vies privées ou publiques à la lumière des attentes marquées par la fluidité et la fragmentation des identifications propres à la pluralité des nos sociétés et aux forces de la biopolitique?

 

II. Résistance et critique de l’espace institutionnel : entre fluidité et solidité


D'un point de vue davantage axé sur les espaces institutionnels, il s’agira d’explorer et d’analyser les  changements contemporains liés aux instances sociales traditionnelles, telles la famille, l’école, le monde du travail, les partis politiques, l’église, etc. De quelle manière ces changements sociaux se révèlent-ils dans le choix individuel et collectif de la vie quotidienne des acteurs sociaux ? Quels modèles semblent pouvoir remplacer ces instances sociales traditionnelles, ou à l’inverse, comment résistent-elles aux changements ? En ce qui concerne d’autres espaces institutionnels, telles les frontières de l’État nation et de la territorialité, on essayera d’exploiter le champ critique du politique définissant, d’une part les processus fluides de transformation des liens frontaliers, et d’autre part les phénomènes de solidification de ces liens. Comment les liens sociaux, culturels et nationaux se représentent-ils dans l’espace-temps historique et géopolitique ? Comment les acteurs sociaux et politiques essayent-ils de composer avec les impératifs des enjeux de la globalisation, de définition frontalière et des marchés transnationaux, face à l’exclusion et la précarité touchant les populations le plus fragilisées ? Y aurait-il des instances de solidarité collective capables de concilier effectivement reconnaissance citoyenne, pluralisme et justice sociale avec un investissement économique d’envergure, tant au niveau institutionnel et étatique qu’au niveau du monde associatif ?

 

Calendrier : Les propositions de communication doivent être envoyées en français ou anglais (max.une page), avec une brève biographie indiquant le centre de rattachement et les recherches en cours (les communications portant sur de données empiriques sont particulièrement les bienvenues). 

  • Réception des résumés/date limite : 17 juillet 2014
  • Résultat de sélection des propositions : 17 août 2014
  • Réception des communications : 20 octobre 2014

Contacts : Lenita Perrier et Marion Bottero / Adresse : lperrier@msh-paris.fr

Organisateurs : Rémy Bazenguissa-Ganga (IMAf), Lenita Perrier (IMAf), Henrique Nardi (Université Fédérale du Rio Grande du Sul, IRIS-EHESS), Marion Bottero (Université Paris X, Nanterre La Défense).

Comité Scientifique : Michael Banton (University of Bristol, United Kingdom), Rémy Bazenguissa-Ganga (IMAF, France), Abdelhamid Benkhattab (Université Sidi Mohamed Ben Abdallah, Maroc), Jean Paul Colleyn (IMAF, France), Pascale Gruson (Institute Marcel Mauss, CEMS-EHESS, France), Henrique Nardi (UFRGS, Brésil, IRIS-EHESS, France), João Pacheco de Oliveira (Museu Nacional, UFRJ, Brésil), Lenita Perrier (IMAF, France), Oscar Quintero (Universidad Nacional de Colombia, IRD-URMIS, France), Angela Torresan (University of Manchester, United Kingdom), Ulrike Zander (IMAF, France).

Comité d’organisation : Katia Machado (Paris 3 - Sorbonne Nouvelle), Marie-Catherine Scherer (IMAF, France), Lionel Saporiti, (Université de Strasbourg), Stéphanie Pouessel (IRMC, Tunis).


Quelques références non exhaustives ayant orienté notre réflexion :

  • AMSELLE, Jean-Louis (2011). L’ethnicisation de la France, Paris, Éditions Lignes.
  • APPADURAI, Arjun (2005). Après le colonialisme. Les conséquences culturelles de la globalisation, Paris, Éditions Payot & Rivages.
  • BANTON, Michael (1998). Racial Theories, UK, Cambridge University Press.
  • BARTH, Fredrik (1969). Ethnic Groups and Boundaries, USA, Waveland Press, Inc.
  • BAUMAN, Zygmunt (2010). Identité, Paris, Éditions de l’Herne.
  • BAUMAN, Zygmunt (2005). Liquid Life, Cambridge, Polity Press Ltd.
  • BAUMAN, Zygmunt (2000). Liquid Modernity, Cambridge, Polity Press Ltd.
  • BAZENGUISSA-GANGA, Rémy (2012). « Paint it “Black”: How Africans and Afro-Caribbeans became « Black » in France », in T. D. Keaton, T. Sharpley-Whiting and T. Stovall, Black France – France Noire: the history and politics of Blackness, Durham: Duke University Press, pp. 184-217.
  • BHABHA, Homi (1994). The Location of Culture, London and New York, Routledge Classics 2004 by Routledge.
  • BONILLA-SILVA, Eduardo (2006). Racism Without Racists: Color-Blind Racism and the Persistence of Racial Inequality in the United States, Rowman & Littlefield.
  • BRUBAKER, Rogers (2001). Au-delà de l’identité, Actes de la Recherche, Centro de Sociologie Européenne du Collège de France et de l’EHESS, N° 139, pp. 66-85.
  • BUTLER, Judith (2004). Undoing Gender, New York, USA, Routledge.
  • ELIAS, Norbert Elias (1991 [1987]). La Société des Individus, Paris, Éditions Fayard, pour la traduction française.
  • ESSED, Philomena (1991[1955]). Understanding Everyday Racism: An Interdisciplinary Theory, Sage Publications, London, The International Professional Publishers, Copyright 1999.
  • FANON, Frantz (1975[1952]). Peau Noire, Masques Blancs : Le négre et la psychopathologie, Paris, Éd. du Seuil. 
  • FASSIN, Didier et FASSIN, Eric (2006). De la question sociale à la question
    raciale ? : représenter la société française
    , Paris, Éditions La Découverte.
  • FASSIN, Eric (2005). L’invention de la question homosexuelle, Paris, Éditions
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  • FOUCAULT, M. (1976). Histoire de la sexualité I : la volonté de savoir, Paris, Gallimard.
  • FOUCAULT, M. (2004). Naissance de la Biopolitique : cours au collège de France
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  • HALL, Stuart (2007). Identités et Cultures : politiques des cultural studies, Paris, Éditions Amsterdam.
  • HONNETH, Axel (2008 [2006]). La société du mépris : vers une nouvelle Théorie critique, Paris, La Découverte.
  • LYOTARD, Jean-François (1979). La condition postmoderne : rapport sur le savoir, Paris, Éditions de Minuit.
  • NDIAYE, Pap (2008). La Condition Noire, Essai sur une minorité française, Paris, Calmann-Lévy.
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  • SPIVAK, Gayatri Chakrovorty (1990). Strategy, Identity, Writing. In The Post-Colonial Critics: Interviews, Strategies, Dialogues, Sarah Harasym (ed.) New York and London, Routledge.
  • TOURAINE, Alain (1997). Pourrons-nous vivre ensemble? Egaux et différents, Paris, Librairie Arthème Fayard, 72-La Flèche.
  • VERGÈS, Françoise ; BANCEL, Nicolas et BLANCHARD, Pascal (2003). La République Coloniale : Essai sur une utopie, Paris, Éditions Albin Michel S.A.
Date limite
  • le jeudi 17 juillet 2014 à 09h
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