La fabrique de l’ethnie dans l’Islam médiéval
IISMM, Salle Lombard
-
96 bd Raspail
- 75006 Paris
Les peuples seraient-ils les principaux acteurs de l’histoire de l’Islam
? L’historiographie les a longtemps relégués au second plan, figés dans
la permanence des faits de nature, rangés dans la nomenclature de la
descendance de Noé, affublés des stéréotypes que leur avait attribué
l’adab de l’époque classique. Tout juste étaient-ils bons à rythmer son
histoire millénaire, de part et d’autre d’une césure qui séparerait vers
l’an mille les peuples historiques de l’Islam (les Arabes, les Persans)
des peuples nouveaux (les Turcs, les Berbères, bientôt les Mongols) qui
en triomphèrent alors. Mais ces glissements proprement telluriques
échappaient au temps historique, celui des dynasties dont l’énumération
compose l’interminable litanie de l’histoire de l’Islam. Se serait-on
trompé d’échelle ? Aux origines de chaque dynastie, de chaque aventure
historique, jouaient en effet des forces de ralliement et
d’identification qui ne sont pas sans rappeler ce que l’anthropologie
désigne par ethnogenèse. Qu’elle se logeât dans l’intimité d’une langue,
dans le retranchement d’un espace d’origine, dans la récapitulation
d’une généalogie commune, l’identité ethnique dont procédaient souvent
les forces qui portaient une dynastie au pouvoir pourrait bien ne pas
toujours lui avoir préexisté mais être advenue dans le même mouvement.
Le
colloque Fabrique de l’ethnie se propose ainsi d’explorer l’ethnicité
dans ses rapports avec la langue et l’espace, en marge ou au cœur même
des processus politiques qui ont tant de fois modifié la distribution du
pouvoir dans l’histoire de l’Islam. Les témoignages en sont certes
disparates, selon que l’identité ethnique s’est pérennisée ou s’est
effacée, selon qu’elle a ou non triomphé, trouvé ou non son support
d’élection, sa niche écologique. Mais à des degrés variables, il n’est
guère d’histoires en Islam qui n’en portent la trace. Que l’ethnie soit
le produit d’une histoire est une évidence. Que l’histoire de l’Islam
fût le produit de l’incessante fabrique de l’ethnie mérite qu’on s’y
attarde.
Contact : julien.loiseau(arôbâse)univ-montp3.fr
Programme
Jeudi 5 décembre
- 9h30. Accueil des participants
- 10h. Séance 1 : les discours de fondation
- Sobhi Bouderbala
(Université Tunis 1), Les Yéménites de Fustat et la quête des origines :
fabrique de l’ethnie et conflits sociaux en Égypte aux deux premiers
siècles de l’hégire
- Cyrille Aillet (Université Lyon 2, CIHAM-UMR 5648, IUF), Le référent ethnique dans les discours de fondation de l’ibadisme au Maghreb médiéval
- 11h30. Pause café
- 12h. Séance 1 (suite) :
- Marie Favereau (Université de Leyde), Tatar vs Tartare : quand d’un jeu de mots naît une ethnie
- 12h45. Repas
- 14h. Séance 2 : identité et ethnicité
- Abbès Zouache (CIHAM-UMR 5648), L’identité franque en question (Proche-Orient, xie-xiiie siècles)
- François-Xavier Fauvelle-Aymar (CNRS, TRACES-UMR 5608), Abyssins musulmans, Abyssins chrétiens (xe-xvie siècles) : propositions pour une histoire de différenciation identitaire, économique et culturelle
- 15h30. Pause café
- 16h. Séance 2 (suite) :
- Julien Loiseau (Université Montpellier 3, CEMM, IUF), Comment peut-on être circassien ? Identité et ethnicité dans la société militaire mamelouke
Vendredi 6 décembre
- 9h30. Séance 3 :langue et ethnie
- Mehdi Ghouirgate (ERC IGAMWI), Langue et statut de la langue berbère dans les dynasties de l’Occident médiéval (Almoravides, Almohades et Mérinides) : une approche comparative
- Benoît Grévin (CNRS, LAMOP-UMR 8589), Le judéo-arabe : un concept socio-linguistique et ses limites textuelles
- 11h. Pause café
- 11h30. Séance 4 : la naissance des peuples
- Emmanuelle Tixier du Mesnil (Université Paris Ouest Nanterre La Défense), La faillite de l’État omeyyade et l’invention des Andalous
- Ahmed Amrani (Université Paris Ouest Nanterre La Défense), Comment la géographie façonne l’ethnie. Le cas des Arméniens de Cilicie (xiie-xive siècle) selon Ibn Khaldûn
- 13h. Repas
- 14h30. Séance 4 (suite)
- Boris James (INALCO), Quand une confrérie se fait peuple. La ‘Adawiyya comme force de frappe kurde (xiie-xive siècles)
- Gabriel Martinez-Gros (Université Paris Ouest Nanterre La Défense), L’ethnicité est-elle un fait de nature ou d’Etat chez Ibn Khaldûn ?
Date
-
du
jeudi 5 décembre 2013 à 09h30 au
vendredi 6 décembre 2013 à 17h
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