Concurrence et capitalisme. Quelle régulation, pour quelle société?

EHESS - Salle Denys Lombard  -  96, boulevard Raspail  -  75006 Paris
Discutants : Pierre François, directeur de recherches au CNRS, professeur École Polytechnique, chargé de cours à Sciences-po, Paris, auteur de Vie et mort des institutions marchandes, Presses de Sciences Po, 2011 ; Pierre Gervais, maitre de conférences, Université Paris VIII, auteur de Les origines de la révolution industrielle aux États-Unis : entre économie marchande et capitalisme industriel. 1800-1850, Paris, Éditions de l’EHESS, 2004.

Nous vivons une période qui se distingue par le triomphe d’abord, la crise ensuite, des politiques néo-libérales dans les pays anglo-phones, mais aussi par un processus conjoint de globalisation de la finance, de la technologie et des flux d’information. Patrick Fridenson et Philip Scranton évaluent ces transformations à l’aune de l’évolution des organisations des entreprises, de leurs modalités d’approvisionnement, de financement et d’investissement. Ces dynamiques se relient à l’accélération de la circulation de l’information et des transferts monétaires, et à l’importance des processus de migration et de relocalisation. Ces éléments contribuent ensemble à modifier les formes de la concurrence et les sources elles-mêmes du succès ou de la faillite économique.

Suivant cette même perspective, l’ouvrage de Stanziani montre que l’idéal de concurrence tel qu’il est discuté, analysé, proposé, imposé ou rejeté depuis au moins la fin du XVIIIe siècle est une construction intellectuelle qui ne correspond guère au fonctionnement réel des systèmes économiques. Au nom de la concurrence, c’est en réalité un idéal de non-concurrence qui s’exprime sur les marchés. La discipline de la concurrence et la tentative d’inventer un marché concurrentiel visent en réalité, au mieux, à concilier stabilité socio-économique et innovation et, au pire, à exclure une partie des concurrents hors du marché.

A partir de là, l’ambition de réguler le marché n’est pas une caractéristique du XVIIIe siècle « corporatiste » ou du XXe siècle régulationniste et étatiste, mais, au contraire, elle s’exprime avec force aussi au XIXe siècle, à l’époque dite « libérale », ainsi qu’au XXI siècle néo-libéral. Cette remise en discussion de l’histoire du capitalisme ne se limite pas à sa chronologie mais elle touche aussi à son espace ; nous allons démontrer qu’il n’y a guère à opposer les pays dits de droit civil (la France au derechef) aux pays anglo-saxons de common law.

Il n’y a pas de marchés libres à opposer aux marchés régulés mais seulement des formes tantôt analogues tantôt différentes de la régulation. L’histoire des marchés est une histoire globale dans le sens où des modifications analogues ont lieu dans les différents pays à des moments très proches ; cependant, les solutions adoptées demeurent elles aussi irréductiblement locales.

Date
  • le lundi 18 mars 2013  de 14h  à 18h
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