Séminaire collectif du CEHTA

salle Giorgio Vasari  -  2 rue Vivienne  -  75002 Paris

Séminaire collectif du Centre d'histoire et de théorie des arts


Après quelques années de suspension le séminaire collectif du Cehta réouvre ses portes en 2012 avec cinq séances confiées à autant de membres du centre. Ce séminaire a été par le passé un lieu d’échange important pour tous ceux qui s’intéressent à l’histoire et à la théorie de l’art et des images. Cette nouvelle série de séances a l’ambition de faire le point sur les recherches en cours dans notre centre. Dès l’année prochaine la liste des participants sera ouverte aux contributions d’autres chercheurs français et étrangers.
1er mercredi du mois de 11 h à 13 h (INHA, salle Giorgio Vasari, 2 rue Vivienne 75002 Paris), du 4 janvier au 2 mai 2012.
La séance du 1er février aura exceptionnellement lieu de 10 h à 12 h en salle Walter Benjamin


4 janvier 2012 : Georges DIDI-HUBERMAN
L’émotion ne dit pas « je ».
Si l’anthropologie des images inaugurée par Aby Warburg s’est focalisé sur le point de vue des Pathosformeln, il semble nécessaire de revenir aux notions de pathos et d’émotion elles-mêmes, et de réfléchir par conséquent sur leur conditions subjectives, quelque part entre le préindividuel (le Ça) et le transindividuel (les structures sociales).


1er Février 2012 : Jacques AUMONT
(Salle Benjamin)
Le Montreur d'ombre
Le cinéma enregistre, dans le temps et avec le temps, une situation lumineuse, avec ses détails et ses accidents : la lumière, au cinéma et dans les films, est une évidence. En proposant de m’intéresser à la relation du cinéma à l’ombre, je ne veux pas suggérer une inversion facile. L’ombre et la lumière ont besoin l’une de l’autre, mais de manière dissymétrique (il existe des sources de lumière, il n’existe pas de sources d’ombre) ; c’est l’habitude humaine d’essentialiser les expériences sensorielles qui a fabriqué une entité, l’ombre, à laquelle on a tendance à accorder son autonomie par rapport à sa cause, la lumière.
Comme notre monde habituel, le monde des films est partagé entre lumière et ombre, qui s’y composent ou s’y opposent : les films ne peuvent ignorer cette grande division du monde réel ou de son apparence, ni sa valeur agonistique, imaginaire mais universelle. Le cinéma hérite de cette ancienne croyance, et même, souvent, des formes extrêmes qu’elle a pu prendre, en donnant à la lumière et à l’ombre la valeur de principes essentiels, parfois traduits en termes ontologiques. Cependant, sa relation avec l’ombre ne s’épuise pas dans cet héritage, et elle a eu, pour la pratique signifiante et expressive complexe que nous saisissons sous le nom de cinéma, une valeur constitutive. Le cinéma aura été, entre autres, un art de l’ombre, et peut-être bien l’art de l’ombre par excellence – quitte à se demander ce que signifie au juste cette assertion.


7 Mars 2012 : Jean-Claude BONNE
Matisse : l’entre-devenir de la peinture et de l’architecture
Sa conception décorative-vitaliste de la peinture signifiait pour Matisse que l’expression devait procéder d’une « ordonnance quantitative sévère » de forces-signes-couleurs dont la fonction est foncièrement pragmatique (une signesthésie énergisante en place d’une esthétique de l’image). Corrélativement, le tableau en vient à s’ouvrir sur (et à) son dehors par une expansivité à la fois interne (afocalité all-over) et externe (rayonnement all-around). Cette conception conduisit Matisse, dans ses œuvres les plus porteuses d’avenir, à sortir de la peinture de chevalet au profit d’une peinture non seulement murale mais « faisant corps avec l’architecture », au point même d’affecter sa conception et son usage. Matisse n’a eu qu’exceptionnellement la possibilité de mettre en œuvre cette mutation bio-environnementale de l’art. On en analysera le cas le plus accompli : la conception du vitrail Les Abeilles (1952-1955) pour la salle de jeux d’une école maternelle qui détermina une redéfinition profonde du plan initial de l’école. On mesurera l’originalité de Matisse en la confrontant à deux autres importantes conceptions environnementales de l’art dans la première moitié du XXe siècle, à savoir la réalisation du décor de la grande salle du ciné-dancing du café de l’Aubette à Strasbourg par Theo van Doesburg (1927-28) et le dernier atelier new-yorkais de Mondrian (1943-44).


4 Avril 2012 : André GUNTHERT
La légende par l'image. De la peinture d'histoire à l'icône photographique
Célébrées par des prix, exposées au musée, qualifiées d'"icônes", les meilleures images du photojournalisme sont souvent considérées comme l'alliance miraculeuse du hasard de l'instant décisif, de la perfection esthétique et de la pertinence journalistique. "No captionneed" : pas besoin de légende, concluent les spécialistes. Cependant,en recontextualisant cette pointe avancée des pratiques visuelles, on découvre qu'elle s'inscrit dans la tradition de la peinture d'histoire néoclassique, dont le réalisme spectaculaire et la puissance fictionnelle, diffusés par les industries culturelles et l'enseignement élémentaire, alimentent les nationalismes de la période contemporaine. Succédant au système de la monumentalité propagandiste, l'illustration médiatique devient le support par excellence de l'histoire officielle. Plutôt que des images sans légende, les icônes du photojournalisme sont des légendes en image.


2 Mai 2012 : Giovanni CARERI
Le juif figure du chrétien négligent : au autoportrait de Michel-Ange en ancêtre du Christ.
A quelles conditions est-il pensable que Michel-Ange ait pu ‘altérer’ sa propre image pour en faire une figure dont les traits sont ceux d’un Ancêtre du Christ qui ressemble à saint Joseph ? Si l’on considère le père adoptif de Jésus comme l’image traditionnelle du doute et du délai de celui qui est appelé à abandonner la Loi pour se convertir, on peut avancer l’hypothèse que les traits juifs des Ancêtres du Christ sur la voûte de la chapelle Sixtine sont une manière de faire apparaître, à travers la figure du ‘juif obstiné’, celle du chrétien négligent, condition que Michel-Ange a toujours référée dans ses poèmes à sa propre personne.
Nous étudierons les conditions historiques, politiques et culturelles d’un ‘autoportrait’ qui permet de saisir les caractéristiques de la rencontre entre l’histoire de l’humanité composée par les fresques de la Chapelle et l’expérience d’altération qui engage la subjectivité du peintre dans l’histoire chrétienne.




Fondé par Hubert Damisch en 1977, le Centre d’Histoire et Théorie des Arts de l’École des Hautes Études en Sciences sociales (CEHTA) est un lieu d’échanges féconds entre l’histoire de l’art et l’ensemble des sciences humaines. Son intitulé renvoie au propos de son fondateur selon lequel « on ne saurait faire de l’histoire qu’au prix de quelques théories, et de la théorie qu’au prix de beaucoup d’histoire ». Louis Marin et Jean-Claude Bonne ont été les premiers membres du centre. Georges Didi-Huberman, Daniel Arasse, François Lissarrague, Jacques Aumont, Éric Michaud, André Gunthert et Giovanni Careri les ont rejoints pendant les années 90. Le CEHTA se nourrit d’abord des relations avec son environnement immédiat composé par les autres centres de l’École des Hautes Études en Sciences Sociales. Ses interlocuteurs naturels ont toujours été des historiens ouverts à d’autres disciplines, mais aussi des philosophes, des anthropologues et des sémioticiens. Ces connexions ont été très marquées au moment de la fondation du centre par les méthodologies structuralistes, notamment l’anthropologie structurale, la sémiotique, les théories du langage. À ces référents théoriques, il faut ajouter les approches analytiques freudiennes et lacaniennes, notamment l’élaboration psychanalytique de l’analyse du travail du rêve, mais aussi la symptomatologie de la culture et de l’art.




Date
  • du mercredi 4 janvier 2012 au  mercredi 2 mai 2012
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