Présentation :
Au cours des dernières décennies, la corruption a suscité l’intérêt des
analystes et des observateurs les plus divers. Elle est même devenue un thème à
part entière dans le cadre de certaines disciplines, telles que l’économie, le
droit, la science politique, la sociologie, l’anthropologie et l’histoire. Plus
récemment, au carrefour de ces diverses disciplines, des spécialistes en
matière de corruption ont commencé à apparaître, sorte d’authentiques « corruptologues ».
Cette thèse présente une analyse de la corruption en tant que problème public. L’analyse
repose sur une première distinction importante : travailler sur la
corruption en tant que phénomène et l’examiner en tant que problème public
constituent deux choses différentes. Dans le premier cas, l’attention est
centrée sur l’explication d’un phénomène déterminé dont l’existence est
postulée comme donnée, alors que, dans le second cas, l’attention est portée
sur les pratiques et les discours qui conduisent à la configuration d’une
situation déterminée comme problématique. La principale hypothèse qui guide ce
travail entend dissocier la compréhension des processus de constitution d’un
problème public et les transformations du phénomène que ces processus
contribuent à définir et à caractériser. De ce point de vue, une recrudescence
de la corruption en tant que phénomène n’est pas la condition sine qua non
pour que la corruption se constitue en problème. Ce qui nous intéresse
principalement, c’est de montrer qu’il s’agit de deux regards et de deux
analyses indépendantes et que le fait de les croiser ou de les superposer
conduit souvent à des erreurs et à des confusions majeures.
La corruption - en tant que thème ayant suscité un grand intérêt, des débats et
une production intellectuelle au cours de ces dernières décennies, et en tant
que phénomène de plus en plus étudié, évalué et analysé - est une question
particulièrement intéressante pour tenter de montrer quelles sont les
particularités d’une sociologie des problèmes publics.