Le pays qui sentait le musc. Pour une histoire des parfums en Chine

EHESS - Salle 681  -  190-198, avenue de France  -  75013 Paris
Frédéric Obringer donnera une conférence intitulée «Le pays qui sentait le musc. Pour une histoire des parfums en Chine», dans le cadre du séminaire « Histoire des sciences, des techniques et de la médecine en Asie orientale ».

Il est peu de domaines de la culture chinoise qui ne soient concernés par les produits aromatiques et les parfums. L’emploi généralisé des résines et des bois odoriférants est ainsi au cœur même des rituels religieux et officiels, qu’ils soient taoïstes, bouddhistes ou confucianistes ; la seule présence d’un brûle-parfum (xianglu 香爐) suffit à signaler, et souvent presque à délimiter, un lieu qui en devient sacré. Dans le domaine médical, le recours aux fumigations étaient déjà conseillé à maintes reprises dans les documents médicaux de Mawangdui 馬王堆 (antérieurs à 168 av. J.C.) ; ce mode de soin restera par la suite spécifique de certaines catégories nosologiques, telles que les pestilences, les affections cutanées ou les désordres attribués à des entités démoniaques. Les soins du corps ayant recours à divers produits odoriférants et l’usage hédoniste des parfums furent aussi régulièrement mentionnés, en particulier dans les traités de materia medica (bencao 本草), les recueils de recettes médicales (fangshu 方書), les ouvrages consacrés aux parfums (tel le Xiangsheng 香乘, de la fin des Ming), mais aussi dans les biji 筆記, la poésie ou les œuvres romanesques. Les substances aromatiques faisaient également partie de l’univers quotidien du lettré, au sein duquel le brûle-parfum, aux ornementations symboliques, occupait une place au moins équivalente à celle de l’encrier. Il n’est pas jusqu’à la mesure du temps qui n’ait eu un rapport avec les produits aromatiques : la combustion de bâtonnets d’encens (xiangbang 香棒), ou encore de cordes en forme de spirale, servit en effet à matérialiser l’écoulement des heures et des jours. De ces divers usages découla une réelle importance économique des substances odoriférantes, d’autant plus qu’une grande quantité d’entre elles provenait de contrées étrangères. Ce commerce contribua à sa façon au développement des relationsde la Chine avec d’autres aires culturelles. De nombreux produits aromatiques furent aussi proposés pour tributs (gongpin 貢品), comme le musc (shexiang 麝香) par exemple.

L’histoire des parfums en Chine se trouve dès lors à la croisée de nombreuses disciplines : l’histoire des techniques, celle des objets naturels et des produits composés, celle de la circulation et de la géographie des savoirs, des savoir-faire et des marchandises. Enfin, la perception des fragrances nous entraîne vers l’anthropologie et l’histoire des sensibilités et des goûts.

Date
  • le mardi 10 décembre 2013 à 14h
Contact
Urls de référence

Haut de page