Éditorial de la Lettre de l'École n°17, avril 2008

par Christophe Prochasson, Directeur des Éditions de l'EHESS


Dans le cours des profondes transformations qui agitent aujourd’hui la recherche en sciences sociales, les Éditions de l’EHESS, au même titre que l’École elle–même, ont une spécificité à mettre en avant. Les Éditions n’ont jamais été le simple réceptacle des travaux élaborés au sein de l’École ou dans son périmètre intellectuel. Tout en s’en faisant l’écho et en donnant ainsi à leur catalogue un éclat dont on peut se flatter, tant les signatures qui y figurent demeurent des références majeures, elles ont toujours été un acteur à part entière dans l’innovation intellectuelle dont l’EHESS s’est toujours voulue porteuse. Les plus authentiques programmes y ont vu le jour : projet éditorial et projet scientifique y ont été de pair.

Cette ligne, il conviendra de la défendre avec force dans les mois et les années à venir. Elle permet de maintenir cet outil majeur de la recherche en sciences sociales à son plus haut niveau. La réputation internationale des Éditions de l’EHESS sera ainsi en mesure de conserver son statut actuel tout en s’ouvrant à de nouvelles recherches et à de nouvelles générations. Le projet qui porte les éditions est scientifique. Les trois axes de sa politique éditoriale l’illustrent : publier les travaux de recherche vive, rendre compte des controverses épistémologiques, se saisir des débats sociétaux pour fournir des perspectives décalées et scientifiquement de pointe.

Parmi les autres défis auxquels les Éditions de l’EHESS doivent aujourd’hui faire face, celui de la visibilité n’est pas le moindre. Il est urgent que l’énorme capital intellectuel que représentent l’EHESS et ses éditions puisse rencontrer un public plus étendu que la seule communauté des chercheurs en sciences sociales. La collection « Cas de figure » va être relancée avec pour objectif de rapprocher deux temporalités souvent disjointes : l’actualité politique et sociale d’une part, le rythme plus lent de la recherche, d’autre part. On fait le pari que des compromis sont possibles. Les commandes partant de l’intérieur du milieu scientifique que représentent les Éditions de l’EHESS, il sera plus aisé de rapprocher les questions que posent la société et les réponses que la recherche en sciences sociales est en mesure de formuler. Les auteurs de « Cas de figure » se saisissent eux–mêmes des débats sociétaux et choisissent les termes du débat.

L’une des réponses que souhaitent aussi apporter les Éditions de l’EHESS est de multiplier les rencontres publiques, en association avec les Cercles de formation, permettant à différents acteurs de réfléchir, en professionnels, autour de la question de l’édition scientifique et de sa diffusion. On sait que l’avenir de l’édition papier et l’avancée fulgurante du numérique se placent parmi les premiers sujets actuels de préoccupation. Mais il en est bien d’autres qui touchent notamment à la place des chercheurs en sciences sociales dans les débats contemporains. Les Éditions de l’EHESS se doivent de contribuer à ces échanges.

Cette réflexion collective ne peut évidemment se limiter à l’échelle hexagonale. Une autre initiative en cours vise à mettre les Éditions de l’EHESS à la tête d’une action internationale visant à confronter les expériences des presses scientifiques en Europe et dans le monde. Une table ronde doit prochainement être organisée avec les éditions universitaires de l’Europe centrale et orientale. D’autres suivront.

Les Éditions de l’EHESS resteront ainsi fidèles à ce qu’elles ont été : une maison d’édition exigeante et originale dans le paysage à la fois éditorial et scientifique.

Date
  • le mardi 1er avril 2008

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