La « durée de vie » des humains est une grandeur dont les sciences occidentales ont depuis longtemps cherché à décrire les régularités, les variations, les possibilités d’accroissement. Elle est un paramètre central des rationalités démographiques, assurantielles, médicales. L’histoire de sa prise en compte (via des notions comme l’« espérance de vie »..) a fait l’objet de nombreux travaux d’histoire et de sciences sociales. L’organisation de cette journée part d’un constat : si l’on est bien renseigné sur l’histoire du calcul et du façonnement de la durée de vie des humains, on ne sait que peu de choses des pratiques et des discours qui ont participé, aux XVIIIe et XIXe siècles, à la pensée et la gestion de la durée de vie des non-humains — objets, plantes ou animaux. C’est ce sur quoi se portera notre interrogation, notre intérêt allant à la « durée de vie » (et à toutes ses déclinaisons possibles) comprise comme une catégorie des acteurs, pas comme une caractéristique analysée a posteriori. L’histoire de la « durée de vie » renvoie à une large gamme de thématiques : l'histoire de l'entretien et de maintenance (comment faire durer une machine, une infrastructure), l’histoire de la conservation (gérer la durée de vie d'un aliment, d'une ressource), l'histoire de la restauration (d’une oeuvre d’art, d’un bâtiment), l’histoire de l’obsolescence programmée (organiser la « mort » d'un objet au moment de sa conception), l’histoire de la jetabilité et du recyclage. Notre objectif est de mener, à partir de ces différents terrains d’étude, une réflexion d’ensemble sur une grandeur — la durée de vie des non-humains — dont la pensée et la maîtrise sont essentielles pour définir l’inscription des sociétés dans des régimes spécifiques d’historicité et de rapport à la biosphère. Nos questionnements emprunteront notamment à l’histoire environnementale, aux science studies et à l’histoire des cultures matérielles.